Articles


George Auriol

Un artiste beauvaisien aux talents multiples injustement oublié 

(André Dessaint & Marie-Claude Mesnard)

Bulletin de liaison

Sommaires des Mémoires

Liens utiles

Pour nous contacter

Dernières parutions

 

Qu'évoque pour beaucoup d'entre nous le nom de George Auriol ? Pour notre part, nous confessons bien volontiers que nous ignorions totalement ce personnage avant que notre sociétaire Marie-Claude Mesnard ne nous le fasse découvrir. Et pourtant ! Voici ce qu'écrivait

à son propos André Billy, en 1945, dans La terrasse du Luxembourg.

         Ah ! Celui-là, si la postérité ne lui fait pas un sort, elle sera plus coupable que nous, car, nous, nous avions une excuse : Auriol était tellement modeste ! Il parlait si peu de lui ! Dieu sait pourtant qu'il parlait, mais il ne parlait que des livres des autres : «Avez-vous lu ceci ? Avez-vous lu cela ? Lisez donc ceci ! Lisez donc cela ! Vous verrez, c'est épatant ! » Pour la publicité orale qu'il faisait aux livres, les éditeurs auraient dû l'inscrire sur leurs listes de presse. Quel brave type! Quel artiste! ... Quel cœur ardent ! Quelle sensibilité ouverte ! Son œil bleu caressant, sa barbe poivre et sel qu'il agitait en remuant fortement les lèvres, lui composaient un visage si cordial, si affable ! On a beaucoup abusé de la comparaison avec les artistes du moyen-âge ; elle s'appliquerait admirablement au conteur malicieux, à l'illustrateur, au graveur, au dessinateur de lettres qu'il a été et dont le goût a marqué toute l'époque 1900 autant que celui des Grasset et des Mucha. Ah ! les critiques de l'avenir, qui voudront mettre en lumière les valeurs méconnues et les figures demeurées obscures de la fin du siècle dernier ou du commencement de celui-ci, ne manqueront pas de travail ! Surtout qu'ils n'oublient pas.

De son vrai nom Jean Georges Huyot, George Auriol est né à Beauvais le 26 avril 1863, au numéro 6 de la rue du Poivre Bouilli, aujourd'hui rue de Buzenval, de Jean Huyot, employé des Postes et de Claire Joséphine Maillard (1). Après des études faites au collège de la ville, il quitte Beauvais pour accompagner son père, nommé receveur des Postes, successivement à Nantua, Lyon et Villers-Cotterêts où, alors âgé de 20 ans, il commence à écrire en prose des fantaisies qu'il envoie à un journal nouvellement créé à Montmartre: Le Chat Noir, journal satirique portant le même nom qu'un cabaret populaire de Montmartre.
           En décembre 1884, il est appelé à faire son service militaire au 67e
régiment d'infanterie de Soissons. Anormalement libéré moins d'un an plus tard (septembre 1885) pour des raisons que nous ne connaissons pas, il revient au journal où il est nommé secrétaire de rédaction.

             Artiste complet, George Auriol fut tout à la fois, poète, chansonnier, peintre, graphiste et créateur de caractères typographiques. Il est l'auteur de plusieurs chansons dont certaines pour enfants, tout à fait charmantes. Dans Le Chat Noir, édition du 15 avril 1890, il publie une romance qu'il vient de composer : Spring Ballad. Cette romance, sous le titre "Quand les lilas refleuriront», chantée, entre autres, par Tino Rossi (1949), Jean Lumière (reprise en 1965) et Guy Béart (1982) connut une célébrité mondiale (2). Humoriste de talent, il collabora via des illustrations, des poèmes et des contes à la rédaction de plusieurs revues qui par la suite furent publiés en plusieurs volumes (dont Histoire de rire, 1893, En revenant de Pontoise, 1894, Le chapeau sur l'oreille, 1897, etc…). Il écrivit des textes dans des revues comme Fantasio et Pages folles et une rubrique de critique littéraire mensuelle dans la revue ABC. Décorateur de livres et dessinateur de lettres pour affiches, c'est lui qui, en 1899, dessina les caractères de la célèbre affiche La Gitane de Toulouse-Lautrec.

 

          En 1902 il collabora avec la Fonderie G. Peignot et Fils pour créer plusieurs types de polices de caractères typographiques dont s'inspira Hector Guimard pour le lettrage des stations de métro : la Française-légère, la Française-allongée, l'Auriol-labeur, l'Auriol-Champlevé, Clair de Lune et le Robur. En 1902, 1909 et 1924, il publia trois livres consacrés aux cachets et aux monogrammes. Dans la préface du deuxième volume, Anatole France apprécia le graphisme élégant de son œuvre et écrira :
 

«.L'originalité de George Auriol, si sensible dès le début, s'est encore affermie et son adresse à vivifier et à marier deux initiales données se joue des obstacles et triomphe de toutes les difficultés ».
 

De grands éditeurs, comme Larousse et Hachette firent appel à lui pour décorer leurs encyclopédies et leurs livres d'étrennes. Selon certains, c'est à lui que l'on devrait le premier dessin de la Semeuse.

De 1924 à 1928, il enseigna le dessin à l’école Estienne (3) avant de disparaître, à Paris en 1938 , à l’âge de 75 ans, heureux d’avoir connu le succès mondial de sa romance  « Quand les lilas refleuriront »

 

Deux exemples de caractères typographiques Auriol
 

Rappelons qu’il y a dans la bibliothèque de la Société un très beau livre, magnifiquement illustré : George Auriol, 42 contes mêlés de typographie (avec des notes de François Caradec).

     1- Claire Joséphine Maillard était fille de Louis Maillard, artiste à la Manufacture Impériale des Tapisseries de Beauvais
     2- A ne pas confondre avec la chanson de L.Lelièvre fils, H. Varha et F. Doelle " Quand refleuriront les lilas blancs"
 3- Ecole supérieure des Arts et Industries graphiques (Paris 13é  arrondissement)

Haut de page